Ni rouge, ni noir, ni vert. L'autonomie rejette partis,
syndicats et toute forme de gestion et de pouvoir.
Rassembler des foules sous un même drapeau
trouve toujours son origine dans une imposture.
Seule une révolution mettra fin à un système
dont l'obsession de l'argent entraine l'humanité
vers la catastrophe.
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Date de création : 10.03.2011
Dernière mise à jour :
13.11.2025
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Aucun de mes contacts en Chine ne s'attendait à voir Xi intronisé quasiment "huangdi" ("empereur") par le Congrès. Principalement parce que son accession au pouvoir était encore récente (2013) et parce que la figure tutélaire de Deng Xiaoping apparaissait comme la caution morale du régime, acceptée par une grande partie de la société. Elle imposait la nécessité d'une direction collégiale renouvelée régulièrement, mise au service du PCC et de la RPC, et pas d'un homme. C'est ainsi que la Chine avait réussi à se refonder politiquement entre 1989 et 1991 et traverser une crise ponctuée par la perestroïka, la révolte de Tiananmen et la chute du mur de Berlin.
Xi Jinping estime aujourd'hui qu'il a rallié assez de soutiens pour dépasser Deng et se hisser à la hauteur de Mao. Le culte de sa personnalité s'étale déjà un peu partout. Il bouscule les règles de l'exercice du pouvoir dans un pays socialement instable en dépit de ses succès économiques, et qui demeure, d'après mon baromètre, l'un de ceux qui menacent le plus de "péter" (avec l'Italie, l'Algérie, l'Afrique du sud et l'Iran) parce que les contradictions ne font que s'y accumuler. Xi a adopté une stratégie de fermeture à l'intérieur et d'ouverture à l'extérieur qui, par le passé, a causé la perte de bon nombre de dictateurs. Alors... après lui, le déluge ?
Les leures de la "campagne anti-corruption", lutte de factions et entourloupes de palais, sont loin d'avoir cessé. On s'interroge sur le retour au premier plan du nouveau vice-président, Wang Qishan. Wang, grand maître d'œuvre de cette campagne et dont on connaît les compétences à faire le vide autour de lui, ne semble pas parti pour faire de la figuration. Première victime, le Premier ministre Li Keqiang est mis au rebut, relégué aux fonctions protocolaires. Les chiens sont lâchés.
Chine: Xi Jinping et la fin du régime communiste
par David Bartel, à Hong Kong depuis 8 ans, attaché au Centre d'Etudes Français sur la Chine contemporaine (CEFC), travaille actuellement sur l’histoire chinoise des idées politiques modernes
Asialyst - 12 mar 2018
https//asialyst.com/fr/2018/03/12/chine-xi-jinping-fin-regime-communiste/
C’est fait. L’Assemblée nationale populaire a "voté" la réforme constitutionnelle voulue par Xi Jinping: le président de la République populaire de Chine pourra rester au pouvoir au-delà de deux mandats de 5 ans. Ce faisant, Xi Jinping est en train de détruire l’oeuvre de Deng Xiaoping. Le "Petit Timonier" avait mis au point un principe vital pour la survie du PC en Chine: la capacité d’adaptation dynamique. Voilà ce qui a déterminé la surprenante continuité du régime depuis la mort de Mao et la fin de la période totalitaire la plus dure. A l’évidence, cette souplesse a manqué aux autres régimes communistes qui se sont écroulés en Europe de l’Est au tournant des années 1990. Grâce à ses « souris noires ou grises », Deng avait imposé la sortie d’un dogmatisme rigide: celui qui a partout ailleurs miné les dernières assises des pouvoirs totalitaires. Jusqu’au cynisme, son pragmatisme institutionnalisé a permis de « traverser la rivière en tâtant les pierres ».
Pour Deng Xiaoping, la seule chose importante a toujours été la survie du Parti. Après le schisme qui a failli couté la vie à celui-ci au printemps 1989, les vagues promesses de libéralisation politique disparaissent pour de bon, et le mythe libéral des années 1990 s’installe: plus de liberté économique amènera nécessairement le desserrement du régime. Eh bien non ! La liberté de choisir et de consommer n’est pas la liberté, et les deux peuvent même être antagonistes. Un coup d’œil sur le Chili de Pinochet aurait pu permettre de comprendre que les marchands aiment la stabilité, et se soucient assez peu de légitimité démocratique.
Cette stabilité qui est devenu le sacro-saint slogan du régime et qui doit absolument primer sur tout, c’est Deng encore qui l’a permise en nommant non pas un, mais deux héritiers. Dans les régimes communistes – et dans les régimes autoritaires/totalitaires en général – les fins de vie des dictateurs sont généralement des moments délicats, et leur mort, donnent souvent lieu à des accrocs dans la continuité dynastique. Khrouchtchev n’avait pas attendu trois années pour remettre en cause les réalisations et les méthodes de Staline. Trois décennies plus tard, le régime s’effondre. 30 ans, c’est long à vivre dans une dictature. C’est court à l’échelle de l’Histoire… Hanna Arendt disait en substance que les dictatures survivent mal à la disparition du dictateur.
De la même façon, ce n’est pas le falot Hua Guofeng, fait héritier par un Mao Zedong vieillissant, qui pouvait prétendre résister à un Deng déjà rompu aux subtilités de la politique chinoise. En 1976, quand Mao meurt, Deng est un vétéran:compagnon de la « Longue marche » puis de la Guerre contre le Japon, il a dirigé la répression contre les intellectuels « droitiers » après la brève ouverture des « Cent Fleurs ». Il a aussi été deux fois « répudié » par Mao en 1968 et 1976. Deng est un fervent communiste qui a compris que pour que rien ne change – que le Parti reste au pouvoir – tout devait changer (j’emprunte ce mot au regretté Roland Lew). En 1989, il fait la même chose et sauve un Parti que 10 années d’hésitation sur le rythme et l’envergure à donner aux réformes (qu’il a lui-même impulsées) ont mené au bord de la rupture.
En imposant la limitation des mandats pour le personnel politique (deux mandats de 5 ans pour le président de la RPC) et une forme de direction collégiale, Deng voulait éviter les deux écueils dont il a été directement témoin et qui selon lui pouvaient coûter au Parti son existence: le culte de la personnalité et le pendant du « centralisme démocratique », le despotisme d’un individu et son corolaire, le factionnalisme.
Après 5 années au pouvoir, les médias et les intellectuels sont très fermement tenus. Le décès en prison du prix Nobel de la paix montre tant la brutalité que les extrémités dont le régime est capable et le peu de cas qu’il fait d’une « communauté » internationale dont les atermoiements restent lettres mortes. Même les compagnies étrangères, qui ont longtemps bénéficié d’un certain espace pour leur participation au développement économique, sont désormais soumises à des contrôles stricts. Xi Jinping a su habillement utiliser une vaste campagne contre la corruption pour consolider son pouvoir tout en s’assurant le soutien de larges pans de la population. Résultat: la direction collégiale que Deng avait imposée n’est plus. Xi est désormais seul à la manœuvre. Et en inscrivant sa « pensée » dans la constitution, il se veut l’égal de Mao. Faîtes un tour en Chine populaire : son image est partout et les soupçons de dérive vers un culte personnel existent depuis déjà quelque temps.
Alors que les slogans officiels, la « société harmonieuse », la « petite prospérité », pavait le terrain du « rêve chinois » de Xi Jinping, le régime est devenu obsédé par les troubles sociaux et la croissance continue des « incidents de masse ». A tel point que la première décennie du XXIe siècle a vu les dépenses de police pour maintenir la stabilité intérieure dépasser les dépenses militaires – sous l’égide du sulfureux ministre de l’Intérieur Zhou Yongkang, condamné à perpétuité en 2014. Une telle hiérarchisation des dangers en dit long sur la pleine conscience qu’a le pouvoir chinois de la fragilité de sa situation et de la volatilité de sa légitimité. Il n’y a qu’à observer la quantité d’efforts policiers et financiers appliqués à la préservation de ses privilèges nombreux et de ses intérêts multiples ! S’ajoute encore la sophistication des énergies intellectuelles déployées pour empêcher de parler de libre expression ou de démocratie aux fallacieux prétexte de l’identité culturelle et du relativisme des valeurs universelles. Ce ne sont pas là les signes d’une société très saine.
*Les 3 heures et 25 minutes de discours de clôture du dernier Congrès du Parti montrent que le président est déjà bien entraîné à ce jeu. La futurologie est par définition une entreprise pleine d’incertitudes. On ne peut pourtant pas s’empêcher de voir se profiler, d’ici quelques décennies, des images que ceux qui regardaient les actualités du côté du bloc de l’Est au tournant des années 1980 n’ont pas oubliés: un pouvoir de gérontes dans un décorum de rideaux rouges poussiéreux, des discours figés interminables sur l’amitié entre le peuples ou sur les réussites du « socialisme » et de l’exemple soviétique*.
Surtout, une population épuisée, lassée, avait tellement internalisée la menace constante du pouvoir, qu’elle était devenue experte dans sa capacité à savoir dire quoi, quand et à qui pour éviter les ennuis. Au travers d’infinies stratégies du quotidien, elle avait appris à ne pas se faire remarquer des autorités. Une situation qui résonne avec les mots d’un sociologue connu, Sun Liping, écrits en 2009 avant même l’accession de Xi au pouvoir. Le sociologue présentait déjà une erreur possible dans la hiérarchisation des problèmes. Ce n’est pas l’effervescence de la population qui est le problème, mais au contraire sa passivité devant le peu de prise qu’elle a sur son propre devenir. Ce que Sun appelle la « désintégration sociale » , qu’il rapproche de ce qu’un autre sociologue Fei Xiaotong appelait « l’érosion sociale ».
La stabilité – par opposition à l’agitation – sociale est devenue une finalité de la politique chinoise. Ce qui déjà suppose un diagnostic erroné. Pour Sun, il y a déjà une décennie que l’on soigne l’effet pour la cause. La dégénérescence sociale est en réalité due au pouvoir sans limite des dirigeants dont la corruption n’est qu’un symptôme et le mariage du pouvoir politique et du marché la pathologie. Les fastes d’un consumérisme dispendieux et vain font déjà de l’argent la mesure de toute chose. « Il ne reste aux pauvres que l’argent », dit le triste proverbe. Tous les dix ans, le remplacement d’une partie du personnel politique sous couvert de lutte anti-corruption permettait une certaine « circulation » dans la structure de l’État. Sans cela, et si l’actuel président continue à tout interdire, le pays court vers une catatonie politique, sociale et intellectuelle qui aura raison de ce régime. C’est ce qui est arrivé à tous les systèmes plus ou moins autoritaires, plus ou moins totalitaires, qui ont perdu leur vitalité dans les rêves mégalomanes de leur suprême leader vieillissant, et devant la complaisance toujours intéressée de leurs acolytes et autres sycophantes. Xi Jinping a 64 ans et il a l’air en pleine forme. Il en aura 74 dans 10 ans. 80 dans 15 ans… Les dictateurs se bonifient rarement avec le temps.
Qui est Wang Qishan, le nouveau vice-président de Xi Jinping ?
par Heike Schmidt
RFI - 17 mar 2018
http://www.rfi.fr/asie-pacifique/20180316-chine-wang-qishan-nouveau-vice-president-xi-jinping-pcc-parti-communiste
PEKIN - A Pékin, les quelque 3 000 députés réunis au palais du Peuple pour leur session annuelle ont reconduit sans surprise Xi Jinping pour un 2e mandat à la tête de l’Etat. Dimanche dernier [11/03], Xi s’était déjà vu accorder une réforme constitutionnelle qui lui permet de rester au pouvoir au-delà de ce 2e mandat. Mais les yeux étaient tournés vers un autre homme, ce vendredi 16 mars: Wang Qishan a été nommé vice-président.
En Chine, le vice-président occupe un rôle essentiellement cérémoniel et sans réel pouvoir jusqu’à maintenant. Mais cela pourrait changer avec Wang Qishan, nouveau n°2 de l'Etat chinois. L’ex-tsar de la lutte anti-corruption ne faisait plus parti du sérail des 7 hommes politiques les plus puissants. En octobre dernier, lors du XIXe Congrès du Parti, il avait quitté son fauteuil au comité permanent du Politbureau et son poste à la tête de la Commission centrale pour la discipline. Non pas parce qu’il était tombé en disgrâce, mais parce qu’une règle non écrite veut que tout haut dirigeant doit partir à la retraite à l’âge de 69 ans. Son retour tonitruant sur le devant de la scène n’étonne pourtant pas les connaisseurs des coulisses du pouvoir. Wang Qishan est un homme réputé comme étant déterminé et pragmatique.
Il servira de « pompier » à Xi Jinping, note le South China Morning Post, qui ajoute que Wang doit notamment aider son ami Xi à trouver un terrain d’entente avec Washington pour éviter une guerre commerciale entre les deux superpuissances. Sera-t-il aussi efficace sur le terrain diplomatique que dans la lutte anti-corruption ? Parmi ses camarades du Parti, Wang sème la terreur: il a causé la chute d’au moins 100 hauts dirigeants, appelés les « tigres », et 1,5 million de « mouches », des petits cadres ou simples membres du Parti, ont été sanctionnés.
Xi Jinping s'accapare les ministères, Li Keqiang garde les "miettes"
par Axel Payette, stagiaire postdoctoral pour le Conseil Canadien de recherches en Sciences humaines [CRSH]. Ses recherches se concentrent sur les stratégies de résilience du Parti-État chinois
Asialyst - 07 avr 2018
https://asialyst.com/fr/2018/04/07/chine-xi-jinping-accapare-ministeres-li-keqiang-gare-miettes/
Que reste-t-il de Li Keqiang ? On connaît depuis la fin du mars le nom des nouveaux ministères et directeurs de commissions qui formeront la haute administration de la Chine durant le second mandat de Xi Jinping. D’emblée, c’est la situation du Premier ministre qui inquiète: ce dernier « dirige » certes le Conseil des affaires de l’État (nom officiel du gouvernement chinois), mais il a quasiment perdu l’entièreté du contrôle des ministres et ministères au profit de l’équipe Xi-Wang. Même les survivants de la faction de Jiang Zemin ont réussi à faire mieux !
La part de Xi: les points stratégiques sous contrôle
Commençons par le nouveau territoire de Xi Jinping au gouvernement. Le président chinois – avec ses alliés – contrôle à présent les commissions et ministères suivants : la puissante commission pour le développement et la réforme, les ministères du Commerce, du Logement, du Développement rural-urbain, des Affaires civiles, des Transports, de la Sécurité nationale, de l’Audit, de la Défense nationale, des Finances et de l’Éducation. Bref, il contrôle les reformes et les questions de sécurité.
Xi Jinping ne laisse aux autres factions que les miettes du pouvoir. Ainsi les secteurs de l’Agriculture, des Ressources naturelles, des Affaires religieuses et ethniques, et de l’Industrie et Technologies de l’information demeurent entre les mains des « tuanpai », la faction de la Ligue des Jeunesses communistes affiliée à l’ex-président Hu Jintao et au Premier ministre Li Keqiang.
Plusieurs ministres se trouvent tiraillés entre deux factions: Zhao Kezhi à la Sécurité publique, Chen Wenqing à la Sécurité nationale ou encore Huang Shuxian aux Affaires civiles. Chen et Wang, suppose-t-on, ont fini par renier Jiang Zemin au profit d’une fin de carrière sous la protection de Xi Jinping. Mais difficile à dire dans le cas de Zhao Kezhi, un allié de longue date de Hu Jintao.
Une faction qui refuse de mourir: ce qui reste des alliés de Jiang Zemin en 2018
Les alliés de Jiang Zemin – de l’ancien tsar de la Sécurité publique Zhou Yongkang à l’ancien vice-président Zeng Qinghong – ont certes fait l’objet d’incessantes attaques de la part de la commission disciplinaire lorsqu’elle était sous la direction de Wang Qishan. Il n’empêche: ils ont quand même réussi le pari de conserver certaines institutions clés des réformes, comme la Banque Centrale. A sa tête a été nommé Yi Gang (né en 1958), l’un des proches associés de Zhou Xiaochuan (l’ex-Gouverneur à présent). Ce choix s’inscrit dans la continuité des réformes et remplace l’un des réformateurs proches de l’ancien Premier ministre Zhu Rongji par un autre.
Né en 1955, Fu Zhenghua est certes encore sur la corde raide et se trouve maintenant à l’écart du système opérationnel de la sécurité publique. Mais il conserve un poste au Conseil d’État à la tête du ministère de la Justice. Fu demeure l’une des figures les plus visibles de la Chine de Jiang Zemin, lui qui fut directeur de l’unité du 610, l’unité de travail chargée d’éliminer le mouvement Fa Lungong avant sa récente dissolution par Xi Jinping. Il a aussi longuement servi Zhou Yongkang au ministère de la Sécurité publique.
Luo Shugang (né en 1955) fut quant à lui un choix facile pour l’équipe Xi-Wang. Luo, qui se trouve à sa dernière rotation (63 ans), est l’un des derniers associés connus de Liu Yunshan lorsqu’il officiait au département de la propagande. Il était isolé depuis 2014 au ministère de la Culture : le renommer au même ministère de la Culture et du Tourisme ne représentait en rien une menace pour Xi Jinping.
L’avenir contrôlé de Li Xiaopeng
Fils de Li Peng, l’ancien Premier ministre de Deng et Jiang, Li Xiaopeng (né en 1959) avait été nommé ministre des Transports en 2016. Il a été reconduit au même poste en mars dernier. Cet immobilisme peut signifier plusieurs choses: 1) Xi souhaite lui confier d’importants projets d’infrastructures; 2) Xi ne voit pas en Li un allié politique suffisamment crucial pour le renvoyer en province. Mais rien n’est sûr. Ce que l’on sait, c’est que Li a joué un rôle essentiel dans le démantèlement de la bande du Shanxi de Ling Jihua et que tous deux possèdent des affinités en tant que « princes rouges ».
Quel devenir pour Lu Hao et les « tuanpai » ?
C’est peut-être le cas le plus inquiétant après l’isolement de Li Keqiang. Lu Hao (né en 1967) est une figure « tuanpai » importante de la génération 6.5 et un proche de Hu Jintao. Il a étudié à l’Université de pékin sous Li Yining, l’un des économistes les plus influents en Chine et le superviseur de Li Keqiang et de Li Yuanchao. Nommé en 2008 à la tête de la Ligue des jeunesses communistes (comme Li Keqiang et Hu Jintao avant lui), Lu Hao avance à pleine vitesse pour ensuite revenir vers les provinces. Il sera placé à la tête du gouvernement du Heilongjiang en 2013.
Son chemin semblait tracé: Lu pouvait devenir secrétaire du Parti en province comme c’était a coutume coutume chez les « chefs tuanpai ». Mais il fut stoppé dans sa course et relégué au poste de ministre du Territoire et des Ressources naturelles). En soi, le poste est du même rang que celui de gouverneur, mais dans les faits, passer de gouverneur à ministre, lorsqu’on espère une carrière politique au plus haut niveau, c’est être rétrogradé.
Après la chute de Ling Jihua, un autre lieutenant « tuanpai », en 2014, l’équipe Xi-Wang s’est promise de réduire l’influence de la faction de Hu Jintao à l’intérieur du Parti. Mais surtout des « tuanpai » demeuré fidèle à la Chine des années 1990, qui devait favoriser l’alternance entre les factions. Par exemple, le successeur de Lu Hao, soit Qin Yizhi (né en 1965) a été relégué à la vice-direction du bureau central du contrôle de la qualité, de l’inspection et de la quarantaine depuis septembre 2017.
Li Keqiang isolé, Hu Chunhua empêché de devenir membre du comité permanent et Lu Hao écarté de la scène provinciale, le message est clair: les Jeunesses communistes, propulsées par Hu Yaobang dans les années 1980, doivent changer. Car la faction associée à Hu Jintao n’est plus la bienvenue.
Les finances et la gestion des urgences
Né en 1956, Wang Yu est un ancien des champs pétrolifères de Daqing et un membre parfois oublié de la « clique du pétrole », dans laquelle il a engrangé plus de 30 années d’expérience. A présent, Wang est ministre de la Gestion des situations d’urgence. Lui qui a longtemps côtoyé l’ancienne étoile de la politique chinoise Su Shulin (né en 1962) déchue en 2015, est considéré par plusieurs comme membre de la bande du Jiangsu de Jiang Zemin.
Le nouveau ministre des Finances, Liu Kun (né en 1956) [Liu remplace Xiao Jie (né en 1957), un associé de Wu Yi (vice-Première-ministre sous Wen Jiabao) et de Li Keqiang] est un associé de longue date de Wang Qishan lorsqu’il était vice-gouverneur du Guangdong. Connu pour ses efforts de reformes en matière de taxation dans cette province, Liu Kun veut être une figure importante du 2e mandat de Xi Jinping. Il veut participer à mettre en œuvre la « société de moyenne aisance », soit les politiques sociales visant la redistribution des richesses entre les régions pauvres et les régions riches. En ce sens, malgré un Conseil d’État relativement décevant, le choix de Liu Kun pourrait s’avérer décisif pour l’agenda économique de Xi.
Les « inconnus » et la suite: le système Xi-Wang
Outre les visages connus déjà présents autour de Xi, le nouveau gouvernement compte trois membres plus ou moins connus au Centre. E Jingping est ministre des Eaux, Wang Zhigang, ministre des Sciences et technologies, et Sun Shaojun, ministre des Anciens combattants. Avec Li Ganjie, ministre de l’Écologie, ils ne semblent avoir aucun penchant factionnel clair pour l’instant. Cela dit, aucun d’eux ne dirige de ministère jugé « stratégique » par Xi Jinping.
Certaines nominations laissent songeur. Wang Anshun, ex-maire de Pékin et associé de Zhou Yongkang et de Zeng Qinghong, semblait en perte de vitesse depuis 2016. pourquoi est-il demeuré en poste au centre de recherche sur les réformes du Conseil d’État ? Même interrogation pour Wang Yi et de Yang Jiechi aux Affaires étrangères. Le retour de Yang sur la scène politique semble être le résultat d’un compromis, surtout lorsque l’on sait que ce sera Wang Qishan qui pilotera la diplomatie. Grâce à lui, Xi compte, semble-t-il, nettoyer le « système des Affaires étrangères », influencé par Jiang Zemin depuis longtemps.
Aujourd’hui, nous sommes en terre inconnue. Quid de l’institutionnalisation du Parti ? Xi et Wang Qishan ont réussi à extraire (en partie) le siège du pouvoir en dehors du comité permanent vers l’État: en témoigne la nomination de Wang au poste de vice-Président. Xi tente-t-il de se détacher du Parti, voire même d’instaurer un nouveau système politique ? Seul Wang Qishan connaît les intentions du président. Une chose est certaine, le rêve chinois de Xi Jinping, qui en fait signifie « le rêve d’une nation puissante » provoquera encore à l’intérieur du Parti de nombreuses transformations.