Le Monde d'Antigone

Ni rouge, ni noir, ni vert. L'autonomie rejette partis,
syndicats et toute forme de gestion et de pouvoir.
Rassembler des foules sous un même drapeau
trouve toujours son origine dans une imposture.
Seule une révolution mettra fin à un système
dont l'obsession de l'argent entraine l'humanité
vers la catastrophe.

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Date de création : 10.03.2011
Dernière mise à jour : 04.11.2025
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Le retour des morts vivants au Capitole

Publié le 09/01/2021 à 00:48 par monde-antigone

 
Les Etats-Unis ne sont pas passés loin, mercredi, du premier coup d'Etat de leur histoire. La vieille démocratie américaine s'est fait peur. Il n'a manqué à cet assaut qu'un projet politique cohérent. Il n'a manqué aussi que des armes dans un pays qui n'en manque pourtant pas. Sans cela, l'intrusion à l'intérieur du Capitole s'est résumée à une séance de selfies dans les galeries menant aux assemblées. Drôle d'"insurrection" !

Pour la plupart des commentateurs politiques, en incitant les émeutiers à employer "la force" [« Ils ne comprennent que la force »], Trump s'est définitivement grillé. Il a commis la faute de trop qui le délégitimera à jamais, et l'empêchera de se représenter en 2024. Je n'en suis pas certain du tout, car le Parti républicain va mettre du temps à se reconstruire, sans Trump ou à côté de Trump. Les Démocrates, eux, n'ont que quelques jours pour faire voter l'impeachment qui rendrait Trump inéligible. C'est un peu court. Par contre, la perte de son immunité devrait placer Trump sous le coup d'une multitude d'affaires, mais il a assez d'avocats pour les faire durer pendant au moins 4 ans...

Ce coup de force ressemble davantage à un avertissement qu'à un baroud d'honneur. Un avertissement comme le 1er mai 2020, lorsque des miliciens armés se sont introduits dans l'enceinte du parlement du Michigan, à Lansing. Sur le fond, en revanche, cela s'apparente aux tentatives désespérées de revenir à l'ordre ancien, fomentées par une bande d'apparatchiks et de militaires d'un autre temps, comme aux Cortes en 1981 ou à Moscou en 1991. Mercredi, c'était le "retour des morts vivants" à Washington, des fantômes revenant tout droit du XVIIIe siècle. L'extrême droite s'est appropriée un symbole, le temps d'un quart d'heure de célébrité, sans chercher à prendre le pouvoir puisqu'elle s'efforçait de ne pas le perdre, mais en renversant la Constitution.

Situation ubuesque d'un coup d'Etat inspiré par le président en exercice ! Le coup aurait pu être jouable quelques jours plus tôt, quand Trump, contestant le résultat de l'élection du 4 novembre, pouvait encore compter sur le soutien de la quasi totalité des élus républicains du Congrès. Mercredi, jour de la certification, à part quelques indéfectibles, c'était trop tard.


Visages de l’extrémisme: les émeutiers derrière l’attaque de l'US Capitole
FR24 news - 07 jan 2021
https://www.fr24news.com/fr/a/2021/01/visages-de-lextremisme-les-emeutiers-derriere-lattaque-du-capitole-americain-nouvelles-americaines.html


(...) Un total de 68 personnes ont été arrêtées mercredi, selon la police de DC, et une seule d’entre elles était locale dans la région – un détail qui révèle la masse de personnes qui sont descendues à DC pour la manifestation. Voici quelques-uns de ceux qui ont été photographiés ou filmés bien en vue à l’intérieur du Capitole.

- Jake Angeli - Adepte de la théorie du complot QAnon, qui a été liée à une flopée de violence aux États-Unis, Angeli est régulièrement présent lors d’événements de droite et de rassemblements pro-Trump. L’homme de 32 ans, qui a été vu torse nu et portant un chapeau à cornes laineux, est un natif de l’Arizona qui est fréquemment apparu à l’extérieur du bâtiment de la capitale de l’État, a rapporté la République d’Arizona. (...)

- Josiah Colt - Colt est originaire de Boise, Idaho, et a été l'un des premiers à pénétrer par effraction au Sénat. Colt a été identifié (...) après avoir été photographié au Sénat, où il était assis dans le fauteuil du président, Mike Pence. The Statesman a rapporté que Colt, 34 ans, (...) est le PDG d’une société appelée Funnel Craft LLC.

- Richard Barnett - Le chef de 60 ans d’un groupe de défense des droits des armes à feu dans l’Arkansas, Barnett a été photographié assis dans le bureau de Nancy Pelosi. Selon le Washington Post, Barnett s’était identifié comme un nationaliste blanc dans un message Facebook quelques jours avant l’émeute. Le New York Times a signalé que Barnett, qui a dit que son surnom est "Bigo", avait pris une pose personnalisée [un pied sur un coin du bureau; ndc] sur le bureau de Pelosi. Barnett a déclaré au Times qu’après avoir eu accès au bureau de Pelosi: "Je lui ai écrit une vilaine note, j’ai posé mes pieds sur son bureau et je me suis gratté les couilles".

- Derrick Evans - Le 14 décembre, Evans, un républicain, a prêté serment en tant que législateur à la Chambre des délégués de Virginie-Occidentale. Mercredi, Evans se serait filmé lui-même et d’autres personnes prenant d’assaut le Capitole en criant: "Nous y sommes ! Continuez à bouger, bébé !" alors que les partisans de Trump ont envahi le bâtiment. La vidéo, publiée en ligne par Evans, a depuis été supprimée, mais USA Today a rapporté qu’Evans, qui portait un casque noir, est entré dans la rotonde du Capitole. (...)
[Autre figure de l'extrême droite américaine photographiée à l'intérieur du Capitole, Nick Ochs, fondateur des Proud Boys de Hawaii; ndc]


Qui sont les cinq personnes mortes lors de l'invasion du Capitole ?
par J. C.
Le Figaro - 09 jan 2021
https://www.ledauphine.com/faits-divers-justice/2021/01/09/qui-sont-les-cinq-personnes-tuees-dans-l-invasion-du-capitole


Au total, cinq personnes sont mortes lors de l'invasion du Capitole, à Washington, où siègent les deux chambres du parlement américain. Plusieurs enquêtes ont été ouvertes pour comprendre ce qui s'est passé, et le chef de la police du Capitole a d'ores et déjà démissionné. Parmi les décès, un policier et quatre manifestants. Trois sont morts de raisons "médicales", selon les autorités - les deux autres ayant été victimes d'une arme à feu et d'un pistolet à impulsions électriques. Les autorités ont aussi recensés une cinquantaine de blessés.

- Ashli Babbitt, ex-militaire de 35 ans, abattue d'une balle
Son décès, survenu à l'intérieur même du Capitole, a été largement médiatisé. Ashli Babbit a été abattue par un policier alors qu'elle s'apprêtait à franchir une porte aux vitres brisées. La jeune femme a été touchée par une balle dans l’épaule. Blessée et prise en charge au sol, elle a été transportée à l'hôpital où elle est morte quelques heures plus tard.
Ashli Babbitt était une pure et dure parmi les partisans de Donald Trump - comme la plupart des manifestants ce jour-là. Soutien du mouvement complotiste et d'extrême droite Qanon, cette Californienne "libertarienne" de 35 ans, selon son compte Twitter, voyait le déferlement des partisans de Donald Trump sur Washington comme une "tempête". Elle avait servi 14 ans dans l'armée de l’air américains. Ce qui a poussé les partisans de Trump a lui rendre massivement hommage sur les réseaux sociaux, où elle était très active. Son dernier tweet disait "Rien ne nous arrêtera… Ils peuvent essayer encore et encore mais l’orage est là et il va s’abattre sur Washington dans moins de 24 heures… Des ténèbres à la lumière !"

- Kevin Greeson, défendeur des armes et de la violence
Cet homme de 55 ans, originaire d'Athens, dans l'Alabama, a suscité de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. Militant pro-armes, comme le sont la plupart des soutiens de Donald Trump, Kevin Greeson serait décédé d'une crise cardiaque au sein même du Capitole, alors qu'il tentait de quitter les lieux avec le portrait d'un élu démocrate. Des informations - non confirmées - ont fait état d'un décès consécutif à un tir de pistolet à impulsions électriques qu'il aurait lui-même activé, et qui aurait entraîné la crise cardiaque. Si elle n'est pas écartée, cette hypothèse n'est pas confirmée non plus. Selon un communiqué de sa famille, l'homme souffrait "d’hypertension", et il a "souffert d’une crise cardiaque causée par l’excitation découlant de l’événement". Ces proches de Greeson assurent qu'il était excité à l'idée de prendre part à la manifestation, mais n'aurait pas cautionné "de telles actions" de violence.
Pourtant Greeson, selon ses comptes sur les réseaux sociaux, prônait les armes mais aussi la violence: il affichait sa sympathie pour les "Proud Boys", un groupe masculiniste violent, et défendait son souhait de voir mourir la présidente démocrate de la Chambre des représentants Nancy Pelosi. A Noël, il avait posé près de son sapin... armé de deux énormes fusils.

- Benjamin Phillips, le créateur d’un réseau social trumpiste
Il avait quitté Philadelphie en van avec plusieurs amis pour aller voir Trump à Washington: Benjamin Phillips avait, auparavant, expliqué aux médias locaux sa vision des choses: "Cette année devrait s’appeler l’année zéro car quelque chose va se passer", assurait-il. Il a vu juste, mais ses amis sont rentrés sans lui de la capitale fédérale américaine. Âgé de 50 ans, le programmateur informatique a fait un AVC sur place, selon le Daily Mail, et serait mort à l'hôpital peu après. Les circonstances précises - notamment le lieu où Phillips a été victime de l'attaque cérébrale, dans le Capitole ou à l'extérieur - restent méconnues, mais une enquête est en cours.
Benjamin Phillips était connu chez les trumpistes pour avoir lancé le site Trumparoo.com, un réseau social dédié au 45e président des Etats-Unis, qui proposait toutes sortes d'articles à l'effigie de Donald Trump. Son ex-femme, et mère de leurs deux enfants désormais adolescents, n'a souhaité faire aucun commentaire sur son décès. Ils avaient été mariés de 1999 à 2004.

- Rosanne Boyland, piétinée à mort ?
Elle avait 34 ans, et était une partisane sans réserve du président Trump. Rosanne Boyland dénonçait depuis début novembre les fameuses "fraudes électorales" - jamais démontrées, et écartées par le camp républicain lui-même. Et celle qui a, selon des proches citées par le NYPost, "quitté la drogue", s'était dirigée vers le mouvement Qanon.
Originaire de l'Etat de Géorgie, Boyland a fait l'objet depuis sa mort de nombreux hommages de la part des trumpistes. Selon un membre de sa famille, interrogé par la chaîne Fox 5 Atlanta, elle aurait été "vraisemblablement piétinée à mort" lors des émeutes survenues au Capitole. Mais il n'est pas sûr: "C’est ma conviction personnelle, mais je pense que c’est la rhétorique du Président qui a mené à l’émeute et qui a tué quatre de ses plus grands fans", ajoute-t-il, souhaitant désormais l'utilisation du 25e amendement pour écarter Trump du pouvoir.

- Brian D. Sicknick, un policier frappé à coups d’extincteur
Son décès n'a été connu que plus de 24 heures après: Brian D. Sicknick a succombé à ses blessures, subies "au contact des manifestants", selon la police du Capitole à laquelle il appartenait. Âgé de 42 ans, Brian D. Sicknick en était membre depuis 2008. Il était affecté à l’unité des primo-intervenants (First Responder’s Unit). En première ligne, en somme.
Selon le New York Times, qui cite deux enquêteurs, l'homme aurait été frappé violemment à coup d’extincteur lors d'un mouvement de foule à l'intérieur du bâtiment. Il serait décédé plus tard, à l'hôpital, des suites de ses blessures à la tête. Mais les circonstances précises du drame demeurent floues. Ses collègues lui ont largement rendu hommage, ainsi que de nombreux élus et autres personnalités politiques au contact desquelles il travaillait. Il n'est que le 4e membre de la police du Capitole a décéder en fonction, en deux siècles.


QAnon, "Stop the steal"… d’où viennent les symboles et slogans brandis par les émeutiers du Capitole ?
par Florian Reynaud, Corentin Lamy et Grégor Brandy
Le Monde - 07 jan 2021
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2021/01/07/qanon-stop-the-steal-d-ou-viennent-les-symboles-et-slogans-brandis-par-les-emeutiers-du-capitole_6065504_4408996.html


De nombreux symboles de l’extrême droite américaine ont été repérés, mercredi 6 janvier, lors de la tentative d’insurrection de partisans de Donald Trump à Washington. Tatouages, drapeaux, tee-shirts… Les émeutiers favorables à Donald Trump ayant envahi le Capitole à Washington, DC, mercredi 6 janvier, ont accompagné leur action d’une iconographie bien précise. Après un meeting, ces supporteurs de l’actuel président américain – qui doit céder la place au vainqueur du scrutin présidentiel de novembre 2020, Joe Biden, dont la victoire vient d’être certifiée – ont pris d’assaut le siège du Congrès américain, à Washington.
Les symboles arborés par nombre d’entres eux sont largement utilisés depuis plusieurs années sur les réseaux sociaux, dont certains favoris des partisans de Donald Trump, comme 8chan, Parler, Facebook, etc. Certains faisaient référence à la théorie du complot QAnon, d’autres à des symboles repris par des groupes d’extrême droite. Nos explications.

- De nombreux symboles du mouvement QAnon
Sur cette photographie de l’agence Associated Press, on peut voir un émeutier portant, à l’intérieur du Capitole, un tee-shirt sur lequel on peut lire la phrase « Trust the plan », ("faites confiance au plan"). Ce slogan est l’un des plus répétés par les soutiens du mouvement QAnon, un groupe né sur le forum anglophone 4chan en 2017, qui croit fermement que Donald Trump travaille secrètement à faire tomber un gigantesque complot pédocriminel touchant les élites états-uniennes et mondiales.
Au cours de la dernière élection présidentielle, de nombreux partisans de "Q", nom d’un internaute se faisant passer pour un informateur anonyme proche du président sortant, ont également soutenu la théorie – portée par Donald Trump – que les élections avaient été truquées.
Les symboles de QAnon étaient très présents lors des émeutes de partisans de Donald Trump à Washington, le 6 janvier. Sur une autre photo prise à l’extérieur du Capitole, on pouvait d’ailleurs apercevoir un drapeau arborant la lettre Q. De même, sur un autre cliché pris à l’extérieur du bâtiment du Congrès, un manifestant est affublé d’un patch portant la mention « Where We Go One We Go All », traduite généralement par "un pour tous et tous pour un", un autre slogan populaire chez les adeptes de QAnon.

- Le groupe d’extrême droite Three Percenters
Sur une photo d’Associated Press prise le 6 janvier à l’extérieur du bâtiment fédéral, on pouvait également apercevoir un drapeau appartenant au mouvement d’extrême droite Three Percenters. Ce mouvement est présenté comme un groupe antigouvernement par le Southern Poverty Law Center (SPLC), une organisation qui suit de nombreuses milices d’extrême droite anglophones.
Selon le SPLC, le nom Three Percenters provient de « la fausse croyance historique que seuls 3 % des Américains se sont battus contre les Britanniques durant la guerre d’indépendance ». Les Three Percenters sont proches d’une autre mouvance d’extrême droite aux Etats-Unis, les Oath Keepers, qui recrutent notamment, toujours selon le SPLC, dans le but d’organiser une lutte armée contre le gouvernement américain.

- Le drapeau Thin Blue Line
Sur une photographie de Reuters prise à l’extérieur du siège du Congrès, on peut apercevoir un drapeau noir et blanc, reprenant la bannière étoilée des Etats-Unis, sur lequel est ajoutée une ligne bleue: le Thin Blue Line. Il est arboré ici par un émeutier alors qu’un homme des forces de l’ordre est emporté par la foule. Ce symbole est présenté comme un emblème de soutien à la police américaine, mais a été utilisé à de nombreuses reprises au cours des dernières années par l’extrême droite et aperçu lors de rassemblements néonazis aux Etats-Unis.
C’est l’un des principaux slogans apparus au moment de la défaite de Donald Trump à l’élection présidentielle du 3 novembre 2020. « Stop the steal », traduit par "arrêtez le vol", est une phrase reprise par les partisans du candidat républicain qui croient, comme le président sortant, que l’élection a fait l’objet de fraudes massives pour faire élire le démocrate Joe Biden. Des accusations qui ne s’appuient sur aucune preuve, pour lesquelles toutes les actions en justice ont été déboutées, et qui ont été réfutées en bloc par les autorités américaines. Une pancarte « Stop the steal » a été brandie par un manifestant jeudi 6 janvier, à Washington, DC, devant le Capitole.

- Le drapeau confédéré
Photographié à de nombreuses reprises, le drapeau confédéré a été brandi à l’intérieur du Capitole par les émeutiers. Il s’agit d’un des drapeaux historiques représentant les Etats du Sud lors de la guerre de Sécession (1861-1865). Symbole de la lutte contre l’abolition de l’esclavage, le drapeau confédéré a très récemment été interdit par les autorités à New York et est régulièrement brandi par des groupes américains d’extrême droite. Il est cependant encore affiché près de bâtiments gouvernementaux dans certains Etats du Sud.

- Le tatouage d’un émeutier en peau de castor
C’est le visage de l’envahissement du Capitole, celui qui figure sur toutes les photographies de presse: Jake Angeli, spectaculaire barbu, au visage peinturluré et coiffé d’une peau animale et d’une improbable paire de cornes. La figure la plus reconnaissable de la journée, au point que certains ont retrouvé d’autres photographies du même homme, présent en mars à Tempe, en Arizona, lors d’une manifestation en faveur du mouvement Black Lives Matter – ce qui a suffi à certains pour entendre qu’il s’agirait en réalité d’un militant d’extrême gauche infiltré.
En réalité, Jake Angeli étant bien présent à Tempe, mais du côté des contre-manifestants. Ses tatouages ne laissent de toute façon pas beaucoup de place au doute quant à son idéologie: sur le torse, l’homme arbore le valknut, c’est-à-dire trois triangles entrelacés symboles du wotanisme, mouvement identitaire néopaganiste lié aux mouvances néonazies. Ce n’est d’ailleurs pas un inconnu au sein de l’extrême droite complotiste américaine, puisqu’il avait déjà, au cours des derniers mois, répondu à des interviews où il faisait part de ses opinions pro-Trump.

- Le "Day of the Rope"
Des potences devant le Capitole et des nœuds coulants réalisés à partir de câbles de caméras volés à des journalistes. Si la référence aux lynchages est directe, elle cache également un autre symbole. En 1978, le néonazi William Pierce a publié Les Carnets de Turner, « un plan pour une révolution suprémaciste blanche » selon l’Anti-Defamation League, dans lequel est introduit le concept du « Day of the Rope » (« le jour de la corde »). Il s’agit du moment où, dans le roman, les personnages partent à la chasse aux « traîtres à leur race » avant de les pendre.
Adopté par les milieux suprémacistes, le « Day of the Rope » y est depuis devenu un slogan populaire. Un symbole qui trouve également un écho dans la « tempête » professée par la théorie conspirationniste QAnon, qui prévoit que les membres d’une cabale secrète seront arrêtés simultanément par l’armée, avant d’être pour certains exécutés.

- La mouvance Anonymous
Le masque de Guy Fawkes a pendant des années été essentiellement associé à Anonymous, nébuleuse protéiforme de justiciers-hackeurs. Un symbole qui s’est pourtant dilué ces dernières années, tandis qu’Anonymous perdait de l’importance sur le terrain médiatique, pour devenir le symbole un peu vague de la volonté inarrêtable (et anonyme) du peuple, de la lutte contre l’injustice et de la défiance face aux puissants.
On retiendra tout de même qu’il est apparu pour la première fois dans la bande dessinée V For Vendetta (1982), mais que sa popularité a explosé avec son adaptation au cinéma en 2006. Dans le film de James McTeigue, le héros, qui cherche à mettre à feu et à sang une Angleterre dystopique aux mains d’un régime fasciste, cache son identité sous un masque de Guy Fawkes, instigateur au XVIe siècle d’une tentative d’attentat ratée mais bien réelle contre le Parlement anglais.

- Le Betsy Ross flag
Parfois décrit comme le premier drapeau des Etats-Unis et associé à la guerre d’indépendance, le Betsy Ross flag avait été conçu, comme son nom l’indique, par la couturière Betsy Ross. Dessus, on trouve les treize bandes rouges et blanches toujours utilisées aujourd’hui, mais seulement treize étoiles, placées en cercle, pour représenter les treize colonies américaines.
Au début du XXe siècle, ce drapeau avait été utilisé par le parti nazi américain, rappelle Fast Company. Cela n’avait pas empêché le drapeau d’être placé bien évidence lors de la cérémonie d’investiture de Barack Obama en 2009.
Comme le soulignait Rolling Stone en 2019, ce drapeau est loin d’être le symbole le plus utilisé parmi les groupes suprémacistes, comparé au drapeau confédéré par exemple. Reste que plusieurs événements et polémiques en ont fait un « symbole chargé de sens, particulièrement dans une ère Trump hyperpolarisée ». Dès 2016, la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) avait d’ailleurs dénoncé l’appropriation de ce drapeau par « un soi-disant mouvement patriote et d’autres milices qui répondent à la diversité croissante des Etats-Unis par l’opposition et la suprématie raciale ».

- Le Gadsden flag
« Don’t tread on me » (« ne me marche pas dessus »), menace le serpent à sonnette, enroulé sur lui-même, prêt à bondir sur ce drapeau jaune datant de la révolution américaine, à la fin du XVIIIe siècle.
Ce drapeau de Gadsden, du nom de son inventeur, le colonel Christopher Gadsden (1724-1805), est à l’origine un symbole de la résistance contre l’Anglais. Il connaît un regain de popularité au XXe et XXIe siècle, brandit à nouveau par des formations américaines de droite extrême, mais également de droite modérée, en faisant de ce drapeau un symbole ambigu.


Insurrection à Washington: Ce que signifient les différents drapeaux des manifestants
RTBF - 07 jan 2021
https://www.rtbf.be/info/monde/detail_invasion-du-capitole-a-washington-ce-que-signifient-les-differents-drapeaux-des-manifestants?id=10667734


Les milliers de manifestants pro-Donald Trump ont marqué l’histoire d’une sombre manière, ce mercredi, en envahissant le Capitole, à Washington DC. Tous revendiquent la victoire de leur candidat à l’élection de novembre, alors que les résultats officiels ont attribué le poste de président des Etats-Unis au démocrate Joe Biden. Mais ce n’est pas le seul message qu’ils ont voulu faire passer. Les drapeaux brandis permettent d’en savoir plus sur leurs revendications, leurs intentions et leur credo.

- Le drapeau des Etats confédérés
Pour plusieurs historiens spécialistes des Etats-Unis, dont Nichole Bacharan, ce drapeau est un symbole raciste. "C’est toujours un emblème raciste clair comme de l’eau de roche, utilisé par les groupes d’extrême droite, et parfois par les groupes de défense du port des armes", disait-elle en 2015, après une polémique liée à la présence de ce symbole sur des bâtiments officiels de l’Etat de Caroline du Sud.
Mercredi, on a pu voir ce drapeau à de nombreuses reprises, notamment dans l’enceinte du Capitole. Il représente une croix bleue, des étoiles blanches et un fond rouge. A quoi fait-il référence ?
Son origine remonte à la guerre de Sécession, entre 1861 et 1865. C’est l’emblème des 7, puis 9, puis 11, puis 13 Etats du Sud (les étoiles blanches), favorables à l’esclavagisme. A l’époque, ces Etats veulent devenir indépendants et se séparer de l’Union. Ils veulent donc faire sécession. S’ensuit une guerre particulièrement violente. Aujourd’hui, ce drapeau est récupéré par les nostalgiques de l’esclavagisme, de la domination blanche et d’une Amérique brutale, comme le Ku Klux Klan.
Mercredi, une variante personnalisée a pu être aperçue avec une mitraillette M16 américaine peinte en son centre et le message "Come and take" (viens et prends). Comprenez: le pouvoir.

- Trump 2020. No more bullshit
Lors de la campagne présidentielle, le président sortant Donald Trump a usé de slogans radicaux pour galvaniser ses partisans. L’un d’eux donnait clairement le ton: "No more Bullshit" à traduire poliment par "Fini les conneries". Il s’adresse aux opposants du milliardaire: les démocrates, les médias, les militants anti-racistes…
Ce drapeau affiché ostensiblement avant l’élection a toujours la cote, comme on a pu le voir mercredi à Washington. Certains manifestants l’ont fait entrer dans le Capitole et l’ont accroché à des statues, comme celle du président Gerald Ford, républicain conservateur, successeur de Richard Nixon en 1974.

- Le drapeau américain avec les étoiles en cercle
Encore un symbole du passé. Ce drapeau américain présentant non pas 50 étoiles (les 50 Etats actuels) mais 13 en cercle est la première version, datant du XVIIIe siècle. Les 13 étoiles représentent le nombre d’Etats des premières colonies. Il a été conçu, selon la légende, par la couturière Betsy Ross, mandatée par George Washington, premier président américain.
Ce drapeau fait polémique parce qu’il est associé à la période de l’esclavagisme. En 2019, la marque Nike doit faire marche arrière après avoir posé le drapeau à 13 étoiles sur une paire de baskets.
Vives protestations notamment de l’ex-footballeur américain noir Colin Kaepernick, figure de la lutte contre le racisme aux Etats-Unis. Ce drapeau reste un symbole raciste pour beaucoup d'historiens des Etats-Unis.

- "Don’t tread on me" et le serpent à sonnette
Le Gadsden Flag est un drapeau jaune sur lequel a été dessiné un serpent à sonnette sur le slogan "Don’t tread on me". Cette phrase peut être traduite par: "Ne me marche pas dessus" ou "bas les pattes".
On doit cette symbolique à Benjamin Franklin, l’un des pères fondateurs des Etats-Unis, au temps de la guerre d’indépendance. Benjamin Franklin, écrivain et homme politique dessine en 1754 un serpent découpé couplé à la devise "Join or die" (rejoins-nous ou meurs). Le serpent est le symbole des colonies.
Lors de la révolution contre les Anglais, le drapeau prend forme. Serpent et "Don’t tread on me" (inspiré par les Ecossais et du latin "Nemo me impune lacessit") ne font plus qu’un grâce au colonel Christopher Gadsden, en 1775, qui le présente au Congrès de Caroline du Sud.
Aujourd’hui, ce drapeau a plusieurs significations. De nombreux groupes et institutions se l’approprient. La marine américaine tout d’abord (dans une version différente), les groupes libertariens également dont c’est l’emblème officiel, le Tea-Party (anti-taxes), mais aussi les pro-armes.

- Le drapeau américain, la croix, une arme
L’image était forte, ce mercredi: celle de ces partisans de Trump plantant une croix géante en bois devant le Capitole. Cette croix, on a pu également la retrouver sur certains drapeaux américains aux côtés, une fois encore, d’une mitraillette M16 américaine, symbole du GI lors de la Guerre froide. En dessous, le nom de Trump. Pour ses partisans, Trump représente l’autorité, défend le port d’armes et la défense de la civilisation chrétienne.

- "Born raised and protected"
"Born raised and protected by God, guns, guts & glory" (Né et protégé par Dieu, les armes, les tripes et la gloire). Cette formule a été brandie mercredi par des partisans de Trump au travers d’un drapeau mêlant plusieurs drapeaux: le drapeau américain, le Gadsden Flag…
Ces activistes déclarent se raccrocher au passé glorieux des Etats-Unis, à ses valeurs et à ses racines religieuses. Ils flattent l’instinct violent chez l’homme et prônent la révolution. Ils défendent surtout le 2e amendement de la Constitution qui autorise le port d’arme. Sur ce drapeau, également, c’est un M16 qui est fièrement représenté. Certains vendeurs en ligne offrent en même temps un pin’s de Donald Trump en Punisher, le héros de la série créé par les studios Marvel.

 - Les drapeaux de différents Etats américains
Les manifestants rassemblés devant le Capitole venaient de tout le pays, en témoignent les drapeaux des Etats visibles au pied du Capitole. On a pu apercevoir la torche illuminée de l’Etat de l’Indiana mais aussi de la Caroline du Nord…

- Un drapeau du… Tibet
Non, ce n’est pas un fake. Une photo de l’AFP a immortalisé un combo surprenant: drapeau pro-Trump, drapeau américain et drapeau du Tibet. Quel message a voulu faire passer le créateur de ce mat ? Le Tibet est occupé la Chine, ennemi commercial des Etats-Unis sous l’ère Donald Trump. Il faut donc peut-être y voir un message en faveur de l’économie et de la diplomatie américaines.
Il y a aussi peut-être un lien à faire avec l’actualité récente. Fin décembre, une loi signée par Donald Trump autorise l’imposition de sanctions américaines contre des responsables chinois qui interféreraient dans le processus de désignation du prochain Dalaï-lama. Brandir le drapeau tibétain, c'est aussi, pour certains Américains, une manière de se ranger du côté de Donald Trump.

- Le Pine tree flag
Ici aussi, retour au passé. Le "Pine tree flag", le drapeau du pin, remonte à 1775. Il a été utilisé durant la Révolution américaine par les troupes de Georges Washington et la Massachussetts Navy. Il comporte le slogan "Appeal to Heaven", "Appel au ciel (au paradis)".
Le pin était le symbole de plusieurs tribus indiennes avant d'être récupérés par les colons. La phrase "Appeal to heaven" est tiré des écrits du philosophe britannique John Locke (1632-1704), une référence pour les colons. Il avait théorisé dans ses travaux le droit à la révolution. Ce qu'entreprendront plus tard les colons en Amérique, contre les Britanniques.


Bombes, fusillades et incendie: histoires de violence au Capitole
par Pauline Petit
France Culture - 08 jan 2021
https://www.franceculture.fr/histoire/histoires-de-violence-au-capitole?utm_medium=Social&utm_source=Twitter#Echobox=1610085381


En plus de 200 ans d'existence, le siège du gouvernement américain a connu des manifestations, des attaques à la bombe, des fusillades et même un incendie. Jusqu'à mercredi 6 janvier cependant, il n'avait jamais été envahi par une foule déterminée à faire obstruction au processus constitutionnel. (...) Au cours des deux derniers siècles de son histoire, le "temple de la démocratie américaine" qui abrite les deux organes législatifs du pays - la Chambre des représentants et le Sénat - a connu plusieurs événements violents.

Il est pourtant possible d'accéder au Capitole, en toute légalité, après un contrôle de sécurité. Ou même de manifester dans les bureaux du Congrès. Comme l'explique l'historien émérite du Sénat américain Donald Ritchie au Wall Street Journal, le Capitole a été "un symbole de protestation": en 1932, les anciens combattants de la "bonus army "de la Première Guerre mondiale ont occupé les marches du Capitole pour réclamer leurs pensions en criant "America"; lors de la guerre du Viêt Nam et la révolution iranienne, des manifestants se sont régulièrement réunis aux abords du bâtiment, les pelouses du Capitole ont même été investies par des moutons...Tout cela restait pacifiste. Si bien que pendant longtemps, la surveillance du Capitole était plutôt légère, souligne Donald Ritchie. La police du Congrès a été renforcée après l'assassinat de Martin Luther King Jr., puis l'attentat contre le bâtiment fédéral Alfred P. Murrah à Oklahoma City en 1995, et davantage encore après les attentats du 11 septembre 2001. Mais de mémoire d'historien confie Donald Ritchie, il n'y a "jamais eu de manifestations où des gens sont entrés par effraction dans le bâtiment et ont tenté d’arrêter la procédure. C'est totalement inhabituel pour des manifestations américaines".

Le bruit des canons a cependant retenti de nombreuses fois dans l'enceinte du Capitole. En 1915, une bombe explose dans l'une des salles du Sénat. Le terroriste: Eric Muenter, un ancien professeur d'allemand à l'Université de Harvard qui s'opposait à l'aide financière apportée par le Congrès américain aux Britanniques contre l'Allemagne lors de la Première Guerre mondiale. Dans une lettre adressée au Washington Evening Star, il revendique l'attaque: "[j'espère que l'explosion fera] assez de bruit pour être entendue par dessus les voix qui réclament la guerre. Cette explosion est un point d'exclamation dans mon appel à la paix." Il n'y eut aucune victime, seulement un lustre brisé, du plâtre endommagé et des portes soufflées à déplorer, rapportait le New York Times après l'attentat.

Le Congrès fut aussi la cible d'activistes nationalistes, qui profitèrent de l'ouverture de l'institution au public. Le 1er mars 1954, quatre militants portoricains se fondent parmi les visiteurs du Capitole. Depuis la "galerie des Dames" et aux cris de "Vive Porto Rico libre !", ils visent la Chambre des représentants où était discutée une loi sur l'immigration. Au cours de cette protestation en faveur de l'indépendance de Porto Rico, cinq députés furent blessés. Aujourd'hui encore, des impacts de balles sont visibles sur l'un des bureaux et au plafond de la Chambre des représentants, dont les chaises sont depuis équipées de matériaux pare-balles.

D'autres explosions vont coûter cher à l'institution, en réparation comme en renforcement des dispositifs de sécurité. Dans les années 1970 marquées par l'indignation d'une partie de la population américaine suscitée par la guerre du Viêt Nam, un groupe terroriste appelé The Weather Underground cache une bombe dans les toilettes des hommes. La bombe retentit en pleine nuit, 30 minutes après un avertissement téléphonique au standard du Capitole. Quelques années plus tard, en 1983, c'est sous un banc situé devant le Sénat qu'une bombe est cachée. Encore une fois, il n'y eut pas de victimes, mais d'importants dégâts. Une attaque menée par le groupe Armed Resistance Unit, en signe de dénonciation des interventions militaires américaines au Liban et à Grenade.

Mais l'événement historique auquel de nombreux médias ont fait référence hier (...), c'est l'épisode de l'incendie de Washington, au moment de la guerre anglo-américaine. En 1814, en représailles de l'incendie par les Américains de la capitale canadienne York la précédente année, les troupes britanniques envahirent le nouveau monument pour l'incendier. Le mobilier fut emporté dans les feux lancés dans le hall de la Chambre des représentants ainsi que dans la salle de la Cour Suprême (qui se situait alors au sein du Capitole). Le spectacle fut si terrible qu'un mois après, des membres du Congrès se réunirent pour demander le déménagement du gouvernement fédéral à Philadelphie ou dans une autre ville plus sûre...

12/01/2021 >> Trump juge que son discours prononcé avant l'attaque du Capitole était "totalement approprié". Selon lui, en le bannissant, les réseaux sociaux font "une erreur catastrophique".