Ni rouge, ni noir, ni vert. L'autonomie rejette partis,
syndicats et toute forme de gestion et de pouvoir.
Rassembler des foules sous un même drapeau
trouve toujours son origine dans une imposture.
Seule une révolution mettra fin à un système
dont l'obsession de l'argent entraine l'humanité
vers la catastrophe.
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Date de création : 10.03.2011
Dernière mise à jour :
29.10.2025
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Jamais il y a eu autant d'argent en liquide placés sur des livrets d'épargne ou en assurance-vie. L'Etat lorgne sur le gros cochon rose avec des yeux écarquillés.
De 2015 à 2019, l'encours de l'épargne dite "sécurisée" a progressé en France de 531 milliards d'euros. "En glissement annuel, l'épargne investie en produits de taux augmente nettement (149,7 milliards après 123,2 milliards), en particulier sous forme de dépôts à vue ou de livrets d'épargne (135,6 milliards)", indique la Banque de France. Mais dans un contexte à 0 % d'intérêt, cette somme devient un boulet pour les banques et les assureurs.
Autre problème: celui de l'utilisation de cette épargne. Le gouvernement supplie les ménages de débloquer une partie de cette épargne pour relancer la consommation ou l'investissement. C'est le sens par exemple du nouveau placement de "private-equity" (ou capital-investissement) imaginé par les petits génies de Bercy, qui permet de financer des PME avec la BPI (Banque publique d'investissement). Mais avec les confinements à répétition que nous connaissons, la proportion de ménages estimant qu’il est opportun de faire des achats importants a fortement baissé, tandis que la part des ménages estimant qu’il est plus judicieux d’épargner a augmenté.
L'appétit des épargnants se vérifie, en particulier pour les bons vieux placements "sécurisés" (livrets d'épargne, assurance-vie ), même s'ils ne garantissent pas un rendement, même quand l'inflation fait perdre de l'argent. Leur encours n'a cessé de progresser au cours des dernières années, sans attendre la crise du coronavirus. Selon les chiffres de la Banque de France, l'encours total de ces placements dits "sécurisés" est passé de 2.758,8 Mds € en 2015, à 3.289,7 Mds € au 1er trimeste 2019, soit une augmentation de 19 % en 5 ans. L'argent "qui dort sur les comptes" a augmenté pendant la même période de près de 35 %, 152,5 Mds € pour un total de 594,5 Mds €. En comparaison, les placements dans les produits plus risqués n'ont augmenté "que" de 240 Mds €. C'est à décourager les investisseurs de prendre des risques...
La hauteur de l'épargne est généralement un bon indicateur économique. C'est le signe d'une augmentation du pouvoir d'achat et une promesse d'investissements pour les 10 années à venir. Le hic, c'est que, avec les taux négatifs, tout a changé. Depuis 2016, la BCE impose en effet un taux négatif aux liquidités excédentaires des banques de la zone euro. Autrement dit, déjà que le cash et les comptes à termes des clients, quand ils deviennent trop importants, coûtent cher aux banques, alors, l'épargne sécurisée, sans rendement, sur laquelle les petits épargnants se ruent leur coûte encore plus cher, ainsi qu'aux assureurs.
L'une des vocations de la BCE est d'inciter les banques à prêter pour soutenir l'économie et encourager l'investissement, et ce n'est pas possible si les banques "perdent de l'argent". Aussi, pour réduire la pression sur les résultats des banques, la BCE a bricolé un dispositif censé alléger le poids des taux négatifs, un système de taux à paliers dit de "tiering". En France, pour "soulager" les assureurs-vie, Bercy a publié en décembre 2019 deux décrets visant, d'une part, à desserer la pression sur leurs ratios de solvabilité et, d'autre part, à réformer le fonds eurocroissance. Bercy a également abaissé le rendement de plusieurs livrets, comme le Livret A et le LDDS (Livret de développement durable et solidaire). Depuis le 1er février 2020, ils ont été fixés à 0,50 %, leur niveau plancher, contre 0,75 % précédemment. Selon Fitch, cette baisse devait générer 450 millions d'euros de bénéfice pour les banques françaises. A peine de quoi arracher un sourire à un banquier...
Et puis le coronavirus a tout changé. Depuis le mois de mars 2020, les banques fournissent les milliards que l'Etat lui réclame pour maintenir l'économie à flot. Du coup, les taux d'emprunt négatifs sont devenus une aubaine. La dette publique de la France avoisine maintenant 120 % du PIB. Une montagne de dettes que la contraction de croissance de 8 à 10 % et la chute des recettes de l'Etat vont encore accroître.
Le gros cochon qui ne cesse d'engraisser est de plus en plus regardé avec envie...
Coronavirus: En 2020, l'épargne des Français atteint des niveaux records, avec d'importantes disparités
AFP, 20minutes - 27 nov 2020
https://www.20minutes.fr/economie/2918763-20201127-coronavirus-2020-epargne-francais-atteint-niveaux-records-importantes-disparites
Tous les experts interrogés par l’AFP en conviennent, l’année 2020 représente « du jamais vu » en ce qui concerne les comportements d’épargne en France. De 15 % au 4e trimestre 2019, le taux d’épargne des Français, déjà élevé par rapport à la moyenne européenne, est passé à 26,7 % au 2e trimestre, selon l’Insee. Et si le 3e trimestre pourrait faire état d’une légère décrue, il ne devrait pas revenir à son niveau d’avant-crise, estiment les experts.
Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau a révélé dans une interview à Ouest-France, publiée jeudi soir, que sur les trois premiers trimestres de l’année, la crise du Covid-19 avait engendré une épargne supplémentaire de l’ordre de 90 milliards d’euros, soit 4 % du PIB. A titre de comparaison, les Français avaient épargné 143 milliards d’euros en 2019.
Selon le dernier rapport de la Banque de France: « Au deuxième trimestre, le flux annuel de placement des ménages s'établit à 181,9 milliards, en hausse de 27,9 milliards par rapport au trimestre précédent, en raison de l'"épargne forcée" accumulée pendant le confinement. (...) Les premières données disponibles pour le 3e trimestre montrent une moindre augmentation du numéraire et des dépôts après le point haut observé au 2e trimestre (34,1 milliards au T3 après 63,8 au T2). Toutefois, ils demeurent à un niveau particulièrement élevé ».
Cette « explosion » de l’épargne est due « essentiellement à la difficulté simplement à dépenser », notamment lors du premier confinement, a expliqué à l’AFP Valérie Plagnol, économiste et présidente du Cercle des épargnants. Autre facteur explicatif, « les enquêtes montrent une inquiétude réelle sur le chômage », incitant les ménages à se constituer « une épargne de précaution ».
De ce fait, les placements les plus liquides ont tiré leur épingle du jeu. Le Livret A a connu une collecte nette de presque 25 milliards entre janvier et fin octobre, le double de celle observée à la même période en 2019, et un record historique [L'encours du Livret A avait progressé en 2019 de 12,64 Mds €, à 298,6 Mds €, selon la Caisse des dépôts, en même 410 Mds € si l'on y ajoute le Livret de développement durable et solidaire; ndc]. En revanche, l’assurance-vie, premier placement en France avec un encours de 1.753 milliards d’euros, est la grande perdante de l’année 2020.
Entre janvier et octobre, l’assurance-vie a connu une décollecte de 7,3 milliards d’euros, « une baisse historique », a commenté auprès de l’AFP Franck Le Vallois, nouveau directeur général de la Fédération française de l’assurance. Cette évolution s’explique surtout par une collecte bien moindre, le niveau des prestations versées restant très proche de celui de 2019, permettant d’écarter l’hypothèse de retraits massifs. « L’assurance vie est une des victimes collatérales de la crise sanitaire du fait de sa nature de placement à long terme », a commenté dans une note Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’épargne. La désaffection pour ce produit avait précédé le Covid-19 et s’explique par la baisse depuis plusieurs années des rendements des fonds en euros, très prisés des épargnants il y a encore quelque temps, rappelle Valérie Plagnol.
A l’opposé de l’épargne de précaution, l’épargne financière s’est également bien portée [Elle est passée de 25,4 Mds € au 1er trimestre à 32,6 Mds € au 2e trimestre dont 28 milliards pour les actions cotées et non cotées; ndc]. Selon un rapport trimestriel du groupe BPCE, les titres ont fait l’objet entre mars et septembre « d’achats opportunistes » pour 15,6 milliards d’euros, contre 1,4 milliard en moyenne en 2018 et 2019 sur la même période. Avec l’effondrement des marchés en mars, qui ont depuis rebondi, un certain nombre d’épargnants ont vu une opportunité d’investir à bon compte.
La hausse générale du taux d’épargne observée cette année cache cependant d’importantes disparités au sein de la population française. Selon un sondage Kantar mené pour la Banque de France, « seul un Français sur quatre déclare avoir pu mettre plus d’argent de côté que d’habitude » durant le confinement. Et « certains ménages défavorisés n’ont malheureusement pas pu du tout épargner », a déploré François Villeroy de Galhau [Ses pensées les accompagnent; ndc].
La part des 18-24 ans qui a déclaré avoir pu davantage épargner était légèrement au-dessus de la moyenne des Français (40 %) tout comme celle des foyers gagnant plus de 3.700 € par mois (39 %). Et « les hommes ont semble-t-il plus épargné que les femmes », qui ont des emplois plus précaires, constate Valérie Plagnol, pour qui on assiste à « un creusement des inégalités » et à « une précarisation d’une partie de la population ». Selon elle, on assiste avec l’épargne à une illustration de la "reprise en K", de plus en plus évoquée par les économistes pour décrire le rebond de certains secteurs tandis que d’autres s’enfoncent dans la crise.
2020: La dernière année avant la ruine des épargnants
par Eric Verhaeghe
La Chronique Agora - 18 dec 2020
https://la-chronique-agora.com/2020-derniere-annee-avant-ruine-epargnants/
2020 restera comme l’une des pires années depuis la défaite de Waterloo. La France a consommé une débâcle qui couvait depuis plusieurs années, et devrait sortir de cette crise dans un état pitoyable. Les années qui viennent devraient se traduire par une mise des épargnants au pilori pour retarder le plus possible le temps des ajustements inévitables dans la société française.
2020 marquera les annales, puisqu’elle signale la première pandémie mondiale traitée à coup de confinements et d’étatisations. Jusqu’ici, les épidémies de grippe en tous genres n’avaient jamais débouché sur des blocages mondiaux comme celui que nous connaissons aujourd’hui. Cette nouvelle façon de gérer une crise sanitaire nous plonge dans un inconnu dont l’Histoire percera un jour le mystère.
D’ici là, on peut seulement percevoir la voie que le gouvernement suivra pour en sortir: taxer les riches, bien entendu, expression fourre-tout qui permet de justifier a priori n’importe quelle prédation pour retarder au maximum le moment où il faudra solliciter un effort collectif. Et on a déjà commencé à mettre la main au portefeuille…
Bien entendu, la santé n’a pas de prix. Et comme l’a dit Emmanuel Macron: « quoiqu’il en coûte », il faut sauver des vies.
On s’amusera de lire ces propos en les rapportant aux minorations que tous les partisans de la vaccination à outrance avec des substances mal testées assènent dans les médias. Il semblerait que risquer quelques morts avec des vaccins fabriqués à la va-vite soit moins gênant que risquer quelques morts du coronavirus. Mais enfin, nous ne changerons pas la lutte d’intérêts qui se déroule sous nos yeux incrédules.
D’ici là, pour sauver des vies qui n’ont pas de prix, nous avons sérieusement mis la main au portefeuille. La facture finale devrait s’élever à 20 points de PIB, c’est-à-dire 400 ou 500 Mds €, essentiellement sortis de la planche à billets numériques que la BCE fait tourner allègrement. En réalité, il est difficile à ce stade de dresser un montant exact du coût final de cette opération. Nous ne sommes pas à l’abri d’autres rebondissements en 2021. Toute la question est de savoir combien de temps durera le fantasme d’un argent qui tombe du ciel et qui n’a pas à être remboursé.
Depuis que la BCE garantit aux marchés qu’elle achètera in fine toutes les dettes émises durant la pandémie (plus quelques autres, nous ne sommes plus à cela près), les méninges se creusent pour savoir comment rembourser ces sommes monstrueuses qu’on n’imaginait pas un jour voir défiler en temps de paix. Forcément, ce que nous appelons la tentation maduriste a très vite pris forme. Elle consiste à préconiser une confiscation de l’argent des plus riches pour qu’ils remboursent la crise.
L’une des variantes de cette proposition consiste à ne pas rembourser la dette, tout simplement. On ferait comme si cet argent était libellé en billets de Monopoly, et on décrèterait qu’il n’a jamais existé. Plus vulgairement, on ne peut pas ignorer que l’épargne des Français a bondi de 200 Mds € cette année, du fait des restrictions imposées à l’offre (notamment par la fermeture des restaurants). Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que, dans l’esprit de Bercy, une équation est déjà en place pour récupérer ces 200 Mds € et les mettre « au service de l’économie », c’est-à-dire au service de la dette. Bien entendu, aucun effort sur les dépenses publiques n’est envisagé dans le même temps.
Dans la pratique, tout est prêt pour procéder à cette manœuvre, et Bercy n’attend plus que le feu vert du gouvernement pour lancer ses divisions sur l’armée des épargnants. L’année 2020 n’a pas été chômée de ce point de vue. Non seulement la loi transposant le règlement européen d’octobre 2018 sur la circulation de l’argent liquide a autorisé par avance la confiscation de toute somme en cash qui sortirait du territoire, sous prétexte de lutter contre le blanchiment d’argent sale. Mais on ajoutera que l’OCDE rode et améliore en ce moment tous les échanges automatisés de fichiers permettant de traquer les non-résidents.
Certes, certains pays européens continuent à traîner des pieds, et pas forcément ceux qu’on croit. Des cas comme la Belgique, pourtant si proche, montrent qu’il est encore possible de s’expatrier en circonvenant les mécanismes de surveillance de l’OCDE. Il n’en reste pas moins que le piège se referme peu à peu sur les épargnants français et qu’il sera de plus en plus difficile d’échapper à la souricière. C’est une donnée à bien garder à l’esprit car, de façon pour ainsi dire rituelle, les « riches » seront les premières victimes expiatoires de la crise qui s’annonce.
Pourquoi le rebond des marchés est une mauvaise nouvelle
par Etienne Henri
La Chronique Agora - 17 dec 2020
https://la-chronique-agora.com/pourquoi-rebond-marches-mauvaise-nouvelle/
Les actions grimpent et grimpent… il y a de quoi se réjouir, non ? Eh bien, pas vraiment, si l’on examine vraiment tous les facteurs – et si l’on tient compte de la différence entre prix et valeur. (...)
Durant la majeure partie de l’année, les indices du Vieux continent ont fait pâle figure par rapport à leurs pendants nord-américains: - 7,5 % entre le 2 mars et le 1er septembre pour le CAC 40, + 9 % pour le DAX 30 allemand, tandis que le S&P 500 s’arrogeait + 14 % et que le Nasdaq s’offrait, excusez du peu, + 39,9 %. Les commentateurs et économistes de plateaux télévisés avaient alors beau jeu de se lamenter de la contre-performance des valeurs européennes, et plus particulièrement des titres français. [L'explication est simple: la Fed arrose copieusement les marchés financiers, ce que la BCE fait en de plus faibles quantités en rachetant de la dette; ndc] Ce faisant, ils commettaient un contre-sens majeur en confondant le prix des actifs et leur valeur.
Alors que les actions françaises ont, en novembre, connu un parcours remarquable (+ 21,5 % sur le mois), les mêmes analystes se réjouissent de concert. Une fois de plus, ils se trompent du tout au tout: cette hausse loin des fondamentaux n’est pas une bonne nouvelle pour les épargnants.
Quel bon prix pour une action ? Pour reprendre un adage économique bien connu: « Le prix est ce que vous payez pour acheter un actif, la valeur est ce que vous obtenez en échange ». Déterminer le prix d’une action est facile: il suffit d’ouvrir votre navigateur internet ou l’application smartphone de votre courtier et vous connaîtrez, en quelques secondes, le prix auquel il est possible d’acheter un titre.
Déterminer la valeur, en revanche, est une tâche impossible. M. le Marché s’efforce au quotidien de déterminer la valeur des actifs cotés en synthétisant l’ensemble des informations disponibles. Il hésite, part dans des excès d’optimisme puis de pessimisme en fonction d’éléments qui n’ont parfois rien à voir avec l’entreprise… mais malgré ces errements, nous n’avons jamais trouvé de meilleur moyen de fixer un prix à une action.
Que feraient les opérateurs s’ils étaient omniscients ? La première chose à comprendre est qu’ils seraient, dans ce cas, d’accord sur le prix des actions à tout instant et que, hors phénomènes macro-économiques violents, le cours des actions suivrait une évolution similaire à celui des obligations autour de leur valeur intrinsèque. Un opérateur omniscient n’aurait aucun mal à déterminer la valeur d’une action à un instant T à l’aide d’une formule simple.
En l’absence d’incertitude et dans un contexte où l’épargne sans risque est rémunérée à 0 %, la valeur réelle d’une action est égale à la valeur liquidative (l’argent rendu aux actionnaires le jour où l’entreprise cessera son activité) augmentée des dividendes à venir.
Prenons un exemple bien concret. Vous avez la possibilité d’acheter une action qui vous permettra de toucher, avec certitude, 100 € dans un an lors de la liquidation de l’entreprise. Combien serez-vous prêt à la payer ? Dans un contexte de taux-zéro, jusqu’à 99,99 €: vous êtes ainsi sûr de faire un profit. La payer plus de 100 € n’aurait aucun sens.
Maintenant, imaginez que cette action vous donne droit, toujours avec la même certitude, à 10 € de dividende au 1er janvier en plus de 100 € de valeur liquidative. Combien serez-vous prêt à la payer ? Jusqu’à 109,99 € si vous êtes cohérent.
Pourquoi se réjouir de payer plus cher ? Toutes les actions d’entreprise sont dans la même situation. Même si, n’ayant pas de boule de cristal, nous ne pouvons pas savoir avec précision à combien se montera la somme des dividendes perçus, ni si nos investissements auront une valeur liquidative (qui peut être de zéro en cas de faillite), cette valeur intrinsèque n’existe pas moins: elle sera simplement découverte dans le futur.
Au cours de leur vie, Apple, Microsoft et Tesla reverseront une certaine quantité d’argent à leurs actionnaires – peut-être beaucoup d’argent, peut-être rien. Nous ne connaissons pas cette somme, mais elle représentera un montant chiffrable que connaîtront leurs derniers actionnaires le jour de la liquidation. En ce jour de « jugement dernier », la valeur intrinsèque de l’entreprise sera enfin connue. Ceux qui auront payé moins cher leur titre seront gagnants, ceux qui les auront payés plus cher seront perdants.
Cet exercice de pensée est primordial car il nous rappelle que la valeur réelle d’une entreprise n’est pas virtuelle: c’est au contraire un chiffre bel et bien quantifiable qui nous est simplement, jusqu’au dernier jour d’activité, inconnu. Ce chiffre dépend de beaucoup de facteurs qui, eux aussi, nous dépassent – mais sauf dans de très rares cas où l’entreprise lève des capitaux, il ne dépend en aucun cas du prix payé pour l’action par les investisseurs en Bourse.
Une entreprise dont la capitalisation boursière double en 6 mois, comme nous l’avons vu pour certains titres du CAC 40, est par conséquent une mauvaise nouvelle pour les investisseurs. Cela signifie que, pour pouvoir espérer posséder une part de la valeur intrinsèque de l’entreprise (qui est constante même si inconnue), il faut payer 2 fois plus cher qu’auparavant.
Pour un épargnant qui compte sur les dividendes pour toucher un complément de retraite ou augmenter ses revenus mensuels, le rendement de son investissement vient de diminuer de moitié. Pour un spéculateur qui souhaiterait revendre ses titres avec une plus-value dans 6 mois, un an ou 5 ans, sa plus-value potentielle vient de fondre de moitié.
Les seuls acteurs économiques qui peuvent se réjouir de cette hausse brutale « toutes choses égales par ailleurs » sont ceux qui ont décidé de sortir du marché des actions cet automne. Eux peuvent profiter de la hausse pour vendre leurs titres au plus haut – et encore, à la seule condition qu’ils ne souhaitent pas réinvestir leurs gains sur les valeurs françaises, auquel cas la plus-value redeviendrait virtuelle.
La hausse sans fin d’un portefeuille d’actions peut donner le sentiment de s’enrichir lorsque l’on voit ses lignes passer les unes après les autres dans le vert sur la page d’accueil de son courtier. Ne vous laissez pas avoir par cette illusion: sauf à quitter définitivement le monde de la Bourse, la valeur intrinsèque de vos actifs n’a pas bougé d’un iota. Seul l’Etat pourra, en cas de revente, se régaler de votre « plus-value » pour prélever son obole. Comme pour l’immobilier, les hausse généralisées d’actions n’avantagent que deux acteurs: ceux qui se retirent définitivement du marché et l’État, dont les taxes sont assises sur les prix et non la valeur.